Montréal, sous le signe du vèvè “Marasa“ Imposante manifestation contre la criminalité policière.
- Mérès Weche
- 1 juil. 2020
- 3 min de lecture
Par Mérès Weche Artiste-peintre, écrivain, ex-professeur de Méthodologie de la Recherche, à l´INAGHEI, à l’Université Épiscopale d’Haïti et à l’École Supérieure des Sciences Politiques Appliquées, ESSPA.

“ C’est du jamais vu à Montréal “, me confie un journaliste de Radio Canadaː 50 000 manifestants, issus de 3 groupes ethniques, Noirs, Blancs et Jaunes, se sont rejoints, dès 17 heures, dans un rassemblement “marasa“, à la rue St-Urbain, entre de Maisonneuve Ouest et Ste-Catherine, à l’appel d´organisations de protection des communautés immigrantes, en particulier noires, dont Hoodstock, une organisation haitienne de Montréal-Nord, qui se donne pour mission de mobiliser des initiatives de justice en faveur de ces derniers, ainsi que le groupe Juctice for Victims of Police, pour dénoncer et marcher contre la criminalité policière aux États-Unis et au Canada. Cette manifestation monstre, entreprise par de jeunes Haitiens et Haitiennes de Montréal, débutée sous le signe du “ vèvè Marasa 3 “, a été dominée par le drapeau, noir et rouge de l´Armée indigène haïtienne, plaçant ainsi ladite manifestation sous le signe de la Révolution. “ Il ne suffit plus, dit l’intellectuel haïtien, Henri Piquion - qui s’était fait représenter par ses deux filles “ marasa “ -, de choisir entre un maquillage et un autre, mais de donner vie à un autre monde, comme les esclaves de Saint-Domingue ont voulu intuitivement le faire “.
Juste après le tracé du vèvè et quelques pas de danse vodou exécutés par Élizabeth Lubin au centre du cercle bornant ce pictogramme culturel haïtien, des propos circonstanciés, en anglais et en français, ponctués de courtes harangues créoles, comme “Grenadye alaso ǃ“, ont été lancés avant la marche proprement dite, qui s´est ébranlée, du 1441 St-Urbain, pour longer une bonne partie du boulevard René Levesque et aboutir à Dominion Square. Cette place publique du centre-ville de Montréal est limitée, de l´Est à l´Ouest, par la Tour CIBC et le bureau central de la BNC, et du Nord au Sud, par l’imposante statue de Sir Wilfrid Laurier et la basilique Marie Reine du Monde, attenante à l´hôtel Queen Élizabeth. Je faisais tout de suite allusion à notre petite “ meneuse “ haïtienne, Élizabeth Lubin, drapeau noir et rouge en main, scandant des chants de révolution, au rythme d’un groupe musical “rasin“, qui a animé l’événement, du début à la fin.
En effet, c´est la mort brutale de George Flyod, à Minneapolis, aux États-Unis d’Amérique, qui à déclenché ces cris de révolte pour dénoncer des crimes policiers perpétrés également au Canada aux dépens de jeunes Noirs, tels queː Régis Korchinski-Paquet, de Toronto ; Anthony Griffin de Montréal, quartier Notre-Dame de Grâces, 1987 ; Bony Jean-Pierre, Montréal-Nord, 2016 ; Pierre Coriolan, centre Sud de Montréal, 2017 ; Nicolas Gibbs, toujours dans NDG, 2018.
Pendant que je m’entretenais sur la pleine réussite de l’événement avec le jeune prêtre du vodou haïtien, Ricardo Roland, en compagnie de son amie Anne-Christie Germain, de la communauté haïtienne, très fière de cette valorisation du vodou à l’étranger, une manifestante Blanche s´est plaint des effets pervers du profilage racial, en dénonçant vivement “ l’attitude deux poids-deux mesures de la police de Montréal, qui n´avait pourtant pas brutalisé la toxicomane Anne-Marie Péladeau, auteure de voies de fait sur des policiers, avec à sa charge 21 chefs d’accusation, allant du vol à l’étalage au délit de fuite. Tout simplement, affirme-t-elle, parce qu´elle est Blanche, et de surcroit, la fille d´un magnat de la presse à Montréal “.
Cette imposante manifestation au Québec, contre la criminalité policière, nous ramène à ces mots d´Henri Piquion, rapportés au tout début du texteː “ Il ne suffit plus de choisir entre un maquillage et un autre, mais de donner vie à un autre monde, comme les esclaves de Saint-Domingue ont voulu intuitivement le faire “. J’ajouterais que cette manifestation a été effectivement placée sous le signe de la Révolution haïtienne de 1803. “ Du jamais vu à Montréal “, dixit ce journaliste de Radio Canada.
Mérès Weche
dimanche 31 mai 2020
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